On a tous des moments de faiblesse dans la vie. Le photographe ne déroge pas à cette règle… malheureusement.
Le souci, c’est qu’un craquage en photographie, ça coûte souvent très cher et là je parle bien de matériel. On veut se faire plaisir et on fini avec une convocation chez son banquier.
Voici le récit d’une sordide affaire et d’un craquage complet…
Voici le récit d’une sombre affaire…
Le début de la fin…
L’affaire remonte au vendredi 18 octobre 2013, aux alentours de midi. Le suspect, que l’on nommera Monsieur 23 pour préserver son anonymat, est un homme normal sans casier judiciaire. Il n’avait aucune casserole jusqu’à ce jour…
Que s’est-il passé ce 18 octobre ? Avait-il prémédité son forfait ?
Nous ne le saurons jamais avec certitude, cependant, je vous invite à revenir sur ces faits sordides aux conséquences indiscernables…
Environ quinze jours avant la date fatidique, 23 apprend au travers de son réseau qu’un deal est prévu sur Bordeaux. Le lieu de rendez-vous est une plaque tournante du trafic bordelais.
Le souci, c’est que 23 ne peut être présent pour le deal, il n’est pas disponible à cette date. Il a des obligations et doit faire le sale boulot pour la firme qui l’emploie… Le job est mal payé et parfois ingrat, mais il permet à 23 de se payer quelques petits extras de temps en temps. Trop peu à son goût…
On tient certainement le mobile qui a poussé notre suspect à commettre l’irréparable.
L’atmosphère est pesante, le pire est à venir…
L’envie est trop forte et le deal potentiellement intéressant. Il n’en fallait pas autant pour que 23 décide d’aller causer affaire avec son boss.
– « Boss, vendredi prochain j’ai un bon plan alors faudra pas compter sur moi ! »
– « Hum… Ok ! Mais tu rattraperas les heures que tu me dois… et faudra pas être regardant »
– « Ok boss ! »
C’était plus facile que prévu, bien trop facile même… 23 aurait dû sentir le piège. C’est un instinctif qui sait anticiper les problèmes, il en a même fait son métier pendant un temps… une époque révolue désormais.
Le boulot de 23 est alimentaire et ingrat parfois, il ne s’en cache pas…
La descente aux enfers…
Le jour J approche, 23 n’envisage pas de rester sur place plus longtemps qu’il ne le faudra pour effectuer une transaction. Le fait qu’il se pose déjà la question n’augure rien de bon… Pourtant, il ne réussit pas à penser à autre chose.
– « Si le deal est intéressant pourquoi ne pas rester ? »
– « Il n’y a pas de raison, je suis assez fort pour résister ! »
Il s’était pourtant promis de ne plus se faire prendre la main dans le sac, surtout là-bas… au royaume de tous les excès.
La veille du 18 octobre, 23 décide de s’en tenir à un simple test de came. Une rengaine revient en boucle dans sa tête :
– « Je regarde, je teste, je fais affaire rapidement et je ripe avant que ça tourne mal »
Avec ce plan foireux, il prévoit sciemment de passer dans le rouge pour assouvir son désir.
On peut légitimement penser qu’il y avait eu préméditation. La descente aux enfers est amorcée, ce n’est même que le début…
Le 18 au petit matin, 23 se réveille plus tard que d’habitude. Il n’a pas besoin de se lever pour faire le sale boulot, son boss lui fout la paix pour toute une journée. Il est serein et en profite pour dormir un peu plus. Surtout que sa compagne invasive, la fille du doc, n’est pas là pour lui piquer la couette et les draps. La journée va être longue, un peu de repos n’est pas de trop. 23 va avoir besoin de toute son attention et il le sait.
L’heure du deal approche. Il fait beau. C’est une de ses belles journée d’octobre où tels des lézards, les gens s’agglutinent sur les terrasses des cafés pour profiter de ce moment de répit météorologique. Les passants sont heureux. Bordeaux est une ville où il fait bon vivre.
L’ambiance est idyllique, personne ne peut soupçonner ce qui se prépare à l’horizon… Pas même Serge le Lama qui attend patiemment le prochain tram.
L’ambiance est au beau fixe, seul un léger un point noir reste collé à l’horizon…
23 arrive enfin sur place, une légère hésitation l’empêche d’affronter l’antre de tous les vices. La boutique des frères Panajou est implantée depuis plus d’un siècle à Bordeaux, une bonne partie du trafic transite par cette plaque tournante de la vie bordelaise. 23 entre dans la partie, tout retour en arrière est désormais impossible…
Les autres membres du réseau sont venus en masse, 23 n’est pas seul au rendez-vous. Il se fraye un chemin, tant bien que mal, pour repérer des têtes connues pour se rassurer.
Son plan est basé sur la rapidité, il ne peut perdre plus de temps.
– « Je regarde, je teste, je fais affaire rapidement et je ripe avant que ça tourne mal »
Cependant, rien ne se passe comme prévu, la came est là, mais il ne peut pas y toucher. Pire encore, le deal semble plus intéressant que prévu et pour couronner le tout, il peut obtenir de la came de meilleure qualité.
Tout se complique à cet instant…
Le paysage commence à bouillonner autour de 23…
Une lente agonie…
Une hôtesse physiquement intelligente s’approche de 23, elle le toise du regard. Notre suspect ne la connait pas, visiblement elle vient de loin pour vendre sa came. Les repères ne sont pas là, la came est sécurisée à double tour…
Un exemplaire est cependant mis à disposition pour un test en réel à l’extérieur. En toute impunité, il est possible de mitrailler à tout va dans la rue, viser et shooter sans remord un pigeon ou une vieille mamie à son balcon à quelques dizaines de mètres de là.
L’hôtesse accoste 23 et à partir de là tout s’enchaîne…
– « Vous êtes venu tester la came ? »
– « Bien sûr… tu me prends pour un bleu ou quoi ? »
– « Je vois que vous êtes connaisseur. Vous cherchez quoi exactement ? »
– « Un bon vieux fût qui me permettent de viser large, très large même. Et que ça déforme un max tout ce que je shoote bien sûr. Je veux du lourd. »
– « Ok, un petit test s’impose alors. »
Le test est peu concluant, 23 n’a pu refaire le portrait de quelqu’un comme il le souhaitait. La came ne l’intéresse plus, il n’a aucune confiance dans ses prouesses techniques.
L’hôtesse revient à la charge, elle ouvre plus grand ses yeux et sa démarche se fait plus langoureuse. 23 n’est pas dupe.
– « Tout ce qu’elle veut, c’est me fourguer de la came hors de prix »
C’est plus fort que lui, 23 se laisse pourtant prendre au piège et amorce sa propre descente aux enfers…
Sur cette dernière parole, le sort de M.23 était définitivement scellé. Il s’engouffre tête baissé dans un piège dont il ne sortira pas. A l’instar du vieux manège à quelques mètres de là, une phrase tourne en boucle dans sa tête : « je regarde, je teste, je fais affaire rapidement et je ripe avant que ça tourne mal, je regarde, je… teste, je… ne sais plus quoi faire… ». Quelques heures plus tôt, M.23 était encore sûr de son coup… Désormais, ses tempes cognent à tout va, il a chaud, il sent qu’il franchit la ligne, mais pourquoi freiner alors qu’il en a envie ?
– « Un pro comme vous a besoin d’un bon matériel j’imagine, vous ne recherchez pas quelque chose de plus… sérieux ? »
– « Si bien sûr, mais c’est hors de prix, je ne compte pas prendre ce risque, du moins pas aujourd’hui. »
– « Vous savez qu’on peut vous faciliter le paiement et qu’on prend à notre charge votre ancien matériel ? »
– « … Dites m’en plus… »
Le sort de 23 était définitivement scellé… Il s’engouffre tête baissée dans un piège dont il ne se sortira pas.
– « Je regarde, je teste, je fais affaire rapidement et je ripe avant que ça tourne mal »
Ces mots résonnent comme un lointain écho… Quelques heures auparavant, 23 était encore serein en scrutant le ciel bleu, bien au chaud dans son lit. Désormais, ses tempes cognent à tout va, il a chaud, il sent qu’il franchit la ligne et ses limites…
Mais pourquoi faire marche arrière, alors qu’il est si près du but ?
L’ami 23 est en train de se faire happer par un monde inconnu, à la fois féérique et intimidant…
L’hôtesse expérimentée a eu raison de lui, non seulement il va faire affaire, mais il va dépasser et de loin son budget initial et ses capacités de remboursement.
Certes le deal est parfait, certes il pourra désormais shooter un badaud à plus de 100m ou une voiture en fuite sans aucun souci… mais à quel prix ?
Il n’a pas assez d’argent, il ne peut pas payer, il ne doit pas payer ! La fille du doc va encore lui causer de graves problèmes quand elle apprendra ça. Pire encore, le mec qui gère ses crédits va chercher à le « rencontrer » pour faire connaissance. Et dans le milieu on sait très bien ce que ça veut dire…
23 ressort de l’établissement, la tête vide et la démarche peu assurée. Ce qu’il tient dans un carton lové au creux de son bras, ferait bien des envieux. La parano prend place. 23 cherche à repérer de potentiels agresseurs dans la rue. L’ennemi est partout ! Le claquement d’une portière le ramène à la réalité.
23 sait qu’il va devoir rendre des comptes et se faire discret pendant quelques temps. Il n’assume pas son geste, mais un jour peut-être y arrivera t-il.
Osera t-il utiliser son dangereux achat dans les jours à venir ? Ce qui est sûr c’est qu’on le saura très vite parce que l’affaire risque de faire grand bruit…
Le mal est fait, il n’y a plus de marche arrière possible et plus dur sera l’atterrissage…
Épilogue
Notre ami 23 n’est autre que moi-même, c’est à dire le merveilleux auteur de ce blog ! 🙂
Bref, j’étais présent aux journées portes ouvertes Nikon du magasin Panajou à Bordeaux en octobre 2013 et j’ai craqué pour un objectif Nikon 300mm f2,8 VRII, flambant neuf et très cher !!!
J’étais venu pour acheter un fisheye pour faire de la photo de sport. Je voulais apporter une nouvelle vision à mes photos avec ce matériel. Mais le test de cet objectif ne m’a pas convaincu et j’ai eu peur de ne pas assez l’utiliser par la suite.
Pourtant l’investissement était bien plus light que pour le 300mm f2,8…
Plusieurs années après ce craquage, je ne regrette pas une seule seconde mon achat. J’ai pu le rembourser sans aucun problème et c’est certainement l’objectif que j’utilise le plus. Que ce soit en photo de sport ou en photo animalière, c’est mon chouchou.
Comme quoi, il faut parfois savoir craquer à bon escient ! 😉
[…] J’ai débuté la photo avec un compact de 2 millions de pixels en 2005, pour rapidement acheter un bridge Fujifilm en 2006. Et là… c’est l’escalade, premier réflex en 2007 avec le Nikon D40, puis le D80 en 2008. Quelques années plus tard, j’enchaîne avec un D200 d’occasion courant 2010. Puis vient mon fidèle D300s que j’ai gardé de 2011 à 2015. Après cette longue période où j’ai su progresser tout en étant financièrement raisonnable, c’est le craquage complet… Je passe directement au réflex pro Nikon D4s fin 2015. Le rêve ultime pour moi !!! (Découvrez un autre de mes craquages) […]
Un super caillou..mais va falloir muscler tes petits bras..3 kg quand même. On attend tes photos avec impatience. Si ton banquier fait un infarc on saura qui en est le responsable!!
J’ai fait mon premier test hier, bientôt les photos seront en ligne. 😉
Pour le moment il va bien, mais pour combien de temps… lol
Ah oui!!!superbe l’histoire…..J’ai cru à une reconversion dans le polar noir…Pas d’idée sombre sur votre craquage, votre talent vaut bien une belle folie !!!! A trés bientôt.
J’hésite encore pour la reconversion… Je vais continuer encore un peu dans la photo je pense, surtout avec mon dernier achat. lol
Merci pour les encouragements et pour votre petit message. 😉
Bonne amusement avec ton nouvel ami !! 😉
Fais nous de belles photos, pour que l’on puisse continuer de rêver… 🙂
Je vais essayer. Merci. 😉
Un bel outil de travail. Tu vas en faire de jolies photos. Y’a plus qu’à le dompter maintenant.
Normalement si tout va bien, demain je fais ma première sortie avec. En réalité ma seconde, parce que la dernière fois je savais pas que les marmottes hibernaient déjà et du coup l’objo a juste pris l’air en montagne. lol
Ahah courage! Ton banquier va sans doute vouloir te tuer mais j’imagine déjà les photos au petits oignons que tu vas nous sortir!
Amuse toi bien 🙂
Il parait qu’il me cherche pour me faire la peau. lol
J’espère faire de belles choses avec et qu’il m’accompagne dans ma progression. On va vite être fixé de toute manière. 😉
Merci à toi. 😉